Une photo macro de grenouille

[Making-of] La grenouille de verre émeraude

Aujourd'hui je vous propose un article un peu différent de ceux que j'ai l'habitude de publier sur le blog... Je vous dévoile les coulisses d'une photo macro que j'ai prise au Costa Rica ! C'est une demande qui revenait souvent de la part des lecteurs du blog, alors je n'ai pas eu d'autre choix que de céder ;-)

Je partage avec vous tous les détails qui m'ont permis de réaliser l'image ci-dessous : le choix du sujet, le matériel utilisé, les réglages du boîtier et du flash, la composition et enfin, le post-traitement.

Une magnifique grenouille de verre du Costa Rica
ISO 200 - f/16 - 1/200 s - Flash TTL - Main levée

Le choix du sujet

Parmi les nombreux animaux que l'on peut rencontrer au Costa Rica, les grenouilles sont particulièrement bien représentées avec une bonne centaine d'espèces recensées. On trouve toutes sortes de grenouilles dans le pays mais les grenouilles de verre font partie des spécimens les plus étonnants.

Rassurez-vous, les grenouilles de verre ne sont pas plus fragiles que d'autres grenouilles... En fait, elles sont appelées ainsi car elles possèdent un abdomen translucide qui laisse apparaître leurs organes internes. Ces grenouilles ont aussi une autre particularité, elles ont des yeux captivants qui font le bonheur des photographes !

L'espèce présentée ici est la grenouille de verre émeraude (Espadarana prosoblepon). On la rencontre dans les forêts humides à proximité des cours d'eau et jusqu'à environ 2000 mètres d'altitude. Ces grenouilles sont assez difficiles à repérer en journée car elles se cachent à l'abri des regards dans le feuillage. Par contre, dès que la nuit tombe, elles sortent volontiers de leur refuge pour s'offrir au regard du visiteur.

J'ai eu la chance de croiser cet individu dans l'un des parcs les plus sauvages du Costa Rica : le Parc National Juan Castro Blanco. Nous étions au début de la saison des pluies et une forte averse s'était abattue sur le parc en fin d'après-midi. Les conditions étaient donc réunies pour rencontrer ce sujet fascinant au cours de la nuit !

Le matériel

Pour réaliser cette photo je me suis naturellement tourné vers un objectif macro. Il faut savoir que ces grenouilles font à peine 3 cm de longueur... On doit donc pouvoir se rapprocher suffisamment pour qu'elles occupent une bonne place dans le cadre.

Et c'est justement ce que permet un objectif macro ! Ces objectifs sont conçus spécifiquement pour faire la mise au point à des distances rapprochées et remplir le cadre avec de petits sujets.

Un objectif Nikkor 105 mm spécialisé pour la photo macro
Le Nikon 105 mm propose une distance minimale de mise au point de 31,4 cm.

La photo étant prise de nuit, j'avais également besoin d'un apport de lumière pour exposer correctement mon sujet. Dans ce cas précis, j'ai utilisé un flash cobra car il permet d'avoir plus de liberté pour travailler la lumière que le flash intégré de l'appareil photo.

Le principal risque avec un éclairage au flash est d'obtenir un rendu artificiel si la lumière n'est pas bien maîtrisée. C'est pourquoi, j'ai également utilisé un diffuseur que j'ai positionné sur mon flash cobra. Pour les plus curieux, il s'agit du modèle Big Bounce de la marque Lumiquest et il m'a coûté une vingtaine d'euros. Ce n'est pas un investissement énorme mais cela fait toute la différence !

En effet, le diffuseur a joué un rôle majeur dans la réussite de cette photo. Il a permis d'agrandir la source de lumière et d'obtenir ainsi une lumière plus douce qui a enveloppé le sujet. En utilisant le flash tout seul, la lumière aurait été plus dure et plus directionnelle, les ombres auraient été plus marquées. Au final, le sujet n'aurait pas été mis en valeur.

Un diffuseur monté sur un flash cobra
Le diffuseur Lumiquest Big Bounce pour flash cobra

Les réglages

Le boîtier

Commençons tout d'abord par les réglages du boîtier. Je me suis mis en mode manuel car je souhaitais avoir un contrôle précis de l'ouverture du diaphragme et de la vitesse d'obturation. J'aurais pu aussi shooter avec le mode priorité ouverture (A ou Av) mais j'avais envie d'avoir cette liberté supplémentaire qu'offre le mode manuel...

Quand on fait de la macro et qu'on doit se positionner à quelques centimètres du sujet, la profondeur de champ est souvent très réduite. Il est donc important de choisir des réglages qui permettent d'assurer une zone de netteté suffisante. Pour rappel, si vous voulez augmenter la profondeur de champ, vous devez utiliser une petite ouverture (f/grand chiffre). C'est ce que j'ai fait en réglant l'ouverture du diaphragme sur f/16.

Pour réussir une photo en basse lumière, on doit souvent recourir à des vitesses lentes ou augmenter la sensibilité ISO du capteur pour obtenir une exposition correcte du sujet. Mais comme l'éclairage du sujet allait être assuré en intégralité par le flash, je n'ai pas eu besoin de trop m'attarder sur ces réglages. J'ai choisi une vitesse d'obturation rapide (1/200 s) et j'ai utilisé une sensibilité basse (ISO 200) pour garantir une excellente qualité d'image.

Même avec une petite ouverture, vous pouvez remarquer que je n'ai pas pu avoir de la netteté sur la totalité du sujet. Il fallait donc faire un choix pour définir la zone de mise au point. Dans ce genre de situation, il n'y a pas trop de questions à se poser. La mise au point sur les yeux est évidemment le meilleur choix.

Comme il s'agissait d'un sujet statique, j'ai choisi le mode autofocus ponctuel (AF-S ou One -Shot selon les marques) et j'ai sélectionné un collimateur qui se trouvait au niveau de l'œil gauche. Les deux yeux de la grenouille étant dans le même plan, cela me garantissait que l'œil droit allait être net lui aussi.

Les collimateurs avec la zone de mise au point
La mise au point a été faite sur l'œil gauche de la grenouille.

Le flash

Venons-en maintenant aux réglages du flash. Pour prendre cette photo, j'ai tout d'abord positionné mon flash en mode TTL (Through The Lens). Si cette abréviation ne vous dit rien, cela signifie tout simplement que l'appareil photo dose l'intensité du flash en fonction des informations qu'il reçoit à travers l'objectif.

Ce mode est en général assez précis et il permet de fournir la bonne quantité de lumière pour éclairer sur le sujet. Si besoin, il est toujours possible de reprendre la main et de modifier l'intensité du flash en utilisant la correction du flash.

Afin d'obtenir un meilleur résultat, je n'ai pas positionné mon flash directement sur l'appareil photo. En effet, un éclairage frontal n'est pas flatteur pour le sujet car il a tendance à gommer toutes les ombres. Le sujet manque alors de relief. J'ai donc déporté le flash au-dessus du sujet en le faisant légèrement basculer vers l'avant.

Comme le flash n'était pas au contact direct de l'appareil photo, j'ai dû le déclencher à distance. Pour y parvenir, on peut utiliser un câble qui relie la griffe du boîtier et le sabot du flash ou un émetteur/récepteur sans fil, par exemple.

Pour prendre cette photo, j'ai préféré utiliser une autre méthode. Je me suis servi du flash intégré de mon appareil photo pour déclencher mon flash cobra à distance. Il a juste fallu que je règle le flash intégré en mode contrôleur (ou maître) et le flash cobra en mode asservi (ou esclave). Avec ce système, le flash intégré émet des pré-éclairs qui atteignent le flash cobra et permettent son déclenchement à distance.

La composition

En découvrant cette grenouille de verre, j'avais déjà une petite idée de la façon dont j'allais la photographier. J'ai quand même tourné autour du sujet pour essayer différents angles de vue avant d'arrêter mon choix de composition. C'est d'ailleurs ce que je vous conseille de faire à chaque fois que vous photographiez. Que ce soit pour un portrait, un paysage ou une photo macro, testez des angles de vue et des cadrages différents pour essayer de trouver la meilleure composition possible.

Les grenouilles sont souvent photographiées de dessus avec une vue en plongée. Si cela peut avoir un intérêt naturaliste - pour illustrer les détails présents sur le dos, par exemple - le sujet est rarement à son avantage avec cet angle de vue. De plus, je souhaitais vraiment mettre en avant les yeux de la grenouille et j'avais besoin de créer une proximité avec le sujet.

C'est pourquoi, j'ai décidé de réaliser un face-à-face avec la grenouille. Pour cela, je me suis d'abord agenouillé afin d'être au même niveau que l'animal. Puis, je me suis rapproché lentement pour remplir le cadre avec mon sujet. L'avantage avec les grenouilles c'est qu'elles sont peu mobiles et peu craintives. Contrairement aux oiseaux en vol, ces sujets offrent le luxe d'avoir du temps pour travailler la composition.

Pour placer mon sujet dans le cadre, j'avais plusieurs options. J'aurais pu mettre la grenouille au centre, mais la composition aurait manqué de dynamisme. J'ai donc choisi de la décentrer sur la gauche pour donner un peu plus de vie à la composition.

Le post-traitement

Pour le post-traitement, je me suis limité à des retouches mineures dans Lightroom. J'ai commencé par recadrer légèrement l'image pour décentrer davantage la grenouille sur la gauche du cadre. Ensuite, j'ai ajouté un peu de contraste afin de donner plus de caractère à ma photo. Puis j'ai réduit les hautes lumières car certaines parties de la feuille sur laquelle reposait la grenouille étaient un peu trop claires.

Après avoir appliqué ces réglages de base, j'ai effectué un travail au niveau des yeux à l'aide du pinceau de retouche. Cet outil est absolument génial car il permet de travailler de façon locale et de faire des réglages uniquement sur certaines parties de l'image. J'ai notamment joué sur les curseurs exposition, clarté et saturation pour donner davantage d'intensité aux yeux de la grenouille.

Enfin, j'ai supprimé quelques petites poussières et quelques gouttelettes d'eau brillantes sur la feuille qui avaient tendance à attirer l'œil. Pour cela, j'ai utilisé l'outil de suppression des défauts qui a fait un travail formidable.

Le module Développement de Lightroom
Le pinceau de retouche a permis d'appliquer un masque (en rouge) et de travailler de façon sélective sur les yeux de la grenouille.

Conclusion

Voilà, je pense ne rien avoir oublié... Cela faisait un moment que je voulais proposer ce type d'article et j'espère que vous aurez appris des choses utiles. Si vous avez apprécié l'article, n'hésitez pas à le partager autour de vous !

Fabien Beilhe

Photographe et formateur. Depuis 2012, j'accompagne les photographes de tous niveaux à travers mon blog et mes formations en ligne. Vous êtes passionné.e de photo ? Vous êtes au bon endroit !